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samedi 20 décembre 2014

De la fusion des régions...


Si certaines fusions de régions se justifient, entre les deux régions normandes par exemple, l’idée de fusionner des territoires pour des raisons économiques, et d’abord libérales, est contestable.
Tout d’abord, ce n’est pas la grandeur d’un territoire qui fait la compétitivité (des Länder en Allemagne sont plus petits que certaines régions françaises). Les entreprises n’ont pas besoin de s’installer dans de grandes régions pour être compétitives ! Nombre d’entreprises mondialement connues sont installées dans de « petites » régions. Inversement, la vision que l’on peut avoir des grandes régions est bien relative et, de ce point de vue, la réforme ne changera rien au regard porté par les américains ou les chinois qui distinguent à peine les Etats membres. Un peu plus ou un peu plus grand… Entre nous, la grandeur des territoires fait surtout l'affaire des grands partis !
Ensuite, quelle est la logique de fusionner l’Aquitaine, Poitou-Charentes et Limousin ? Il est probable que de certaines fusions naissent des tensions/rivalités entre « capitales régionales ». ..
D’un point de vue financier, les économies réalisées  ne sont pas évidentes car les investissements à mettre en œuvre restent importants : transports, formation, énergie… Ainsi, selon de nombreux spécialistes, les budgets régionaux seront réduits, mais de manière non significative. Et, finalement, les régions s’éloigneront encore un peu plus des citoyens.
Dans ces conditions, que devient le maillage territorial ? Les départements ? Réponse très partielle, voire superficielle. Des mauvaises langues diront, avec une certaine pertinence toutefois, qu’il s’agit d’un débat centralisateur et parisien. Nous sommes en effet en présence d’un découpage exclusivement administratif, obéissant à une logique libérale et ignorant la plupart du temps les réalités historiques. Mieux aurait valu alors créer de nouvelles régions en oubliant les découpages actuels. Mais c’était sans compter sans les intentions centralisatrices de nos dirigeants !
Ce qui importe, ce n’est pas la devanture, mais ce qu’on prépare à l’intérieur. La réalité c’est le manque de moyens financiers des collectivités territoriales. Il serait préférable d’attribuer aux régions de véritables ressources financières, comme en Allemagne ou en Espagne. Il faudrait aussi  privilégier une vraie décentralisation qui favoriserait le développement territorial grâce à une utilisation des fonds plus judicieuse, notamment en matière de santé et de formation. Enfin, et il y a bien longtemps que cette idée fait son chemin, les coopérations interrégionales et transnationales sont incontournables au développement des territoires (le Conseil de l’Europe et le Parlement européen soutiennent depuis longtemps ces initiatives) à condition de donner aux régions les moyens financiers et juridiques.

dimanche 14 décembre 2014

Capharnüm et manque de courage politique !

Le constat perdure : c'est le grand capharnüm dans l'Union européenne et le courage politique reste aux abonnés absents.

L’Union européenne se dispute sur les déficits et le soutien à la croissance tandis que le FMI rappelle à l’ordre l’Allemagne sur son rôle moteur dans la relance afin qu’elle ne joue pas seulement sa carte personnelle. Bref, l’Allemagne voit ses comptes à l’équilibre (mais des fragilités certaines s’annoncent pour l’avenir), reprise en Espagne (après une crise très forte) et en Grèce, austérité au Royaume-Uni, nouvelle récession en Italie… Quant à la France, elle parvient à faire accepter son budget après des négociations douteuses, par exemple en engageant une réforme des professions réglementées, dont on devine l’influence anglo-saxonne avec des conséquences que seuls les praticiens imaginent. Tout le pragmatisme des politiques !!!
Mais la France pourrait-elle faire à son tour l’objet d’un plan de sauvetage par l’Europe ?

Concernant la taxe sur les transactions financières, qui est à nouveau à l’ordre du jour, la Commission souhaitait que cette mesure rapporte environ 34 milliards d’euros. Evidemment, le projet a été revu à la baisse et seules les actions et quelques produits dérivés seront concernés (non plus les obligations), le tout à partir de 2016. Sur ce sujet la France, contre toute attente, propose une taxe a minima surtout sur les produits dérivés (c’est-à-dire certains contrats d’assurance seulement) car les banques françaises sont très actives sur ce marché. Et, s’agissant des actions, la France propose de taxer selon la nationalité de l’émetteur (actions cotées des entreprises dont le siège social est dans un des onze pays concernés) alors que l’option européenne, encouragée par l’Allemagne, serait de prendre en compte la résidence des opérateurs financiers. Cette deuxième solution permettrait de taxer plus de produits financiers. Mais que d'oppositions et d'intérêts divergents !
Il faut bien avouer, à ce titre, que les lobbys investissent de manière officielle le Parlement et que leur efficacité est redoutable.
J. ATTALI proposait enfin récemment pour la France de relever la TVA de trois points afin de réduire le déficit, alléger les cotisations sociales et relancer l’investissement. Trois points clés. Oui mais voilà, après avoir été envisagée par l’exécutif, cette possibilité a été écartée. Manque de courage politique, évidemment. Et ce ne sont pas des mesures sans portée qui vont changer la donne, crédit d’impôt compétitivité emploi par exemple.

Ce ne sont que quelques exemples qui démontrent cependant combien il est difficile d'avancer de manière constructive et cohérente, non seulement en Europe mais aussi dans chaque Etat. Pourtant, les solutions existent. Mais les conflits d'intérêts, le manque de courage politique et les pressions en tous genres annihilent toutes les bonnes volontés. Mais ces mécanismes complexes et bien huilés , devenus anachroniques, commencent sérieusement à se gripper, n'est-ce pas ?

lundi 8 décembre 2014

Vers des Eurobonds ?

Début novembre 2014, la BCE a décidé de globaliser le bilan des banques centrales de l’Eurosystème en le gonflant de 1000 milliards d’euros, ce qui devrait pousser les banques à se refinancer auprès de la BCE, et ce à bon prix. Il ne s’agit pas encore d’achats d’obligations publiques mais on s’en approche. Les eurobonds (titre de dettes européennes) ne sont pas encore envisageables mais pourquoi pas à terme des obligations liées à des projets d’infrastructures ? 

Toutefois, il est vrai aussi que la décision prise par la BCE ne sera effective que si l’inflation continue de baisser.

La position de la BCE tranche réellement avec l’attitude de l’Union et des Etats qui n’arrivent à prendre des décisions contre l’austérité et les contraintes budgétaires. La question demeure donc d’abord politique et il ne semble guère possible à la BCE d’agir sans l’accord des Etats.
Chemin faisant, des brèches se font jour devant l'ineffecacité récurrente des vieilles recettes économiques. Il y a beaucoup à faire dans ce domaine et ailleurs. Evidemment. Mais tirons profit de ces propositions pour enfin oser et avancer !

mercredi 3 décembre 2014

Le Pape : un personnage non conformiste

Le Pape,  à peine élu, s’est rendu à Lampedusa, où il avait lancé un désormais célèbre « Bienvenue à nos chers immigrés musulmans », puis en Albanie et se rendra bientôt en Turquie. Des signes forts ! Personnage donc non conformiste, il veut aussi « redonner vigueur au projet de l’Europe ». Quelles que soient nos origines et nos références religieuses, force est de constater qu'il a raison !
Le Pape, lors de sa visite au Parlement européen et au Conseil de l’Europe, le 25 novembre, a ainsi déclaré qu’une « des maladies que je vois la plus répandue aujourd’hui en Europe est la solitude. On la voit particulièrement chez les personnes âgées comme aussi chez les jeunes privés de points de référence et d’opportunité pour l’avenir ; on la voit chez les nombreux pauvres qui peuplent nos villes ; on la voit dans le regard perdu des migrants qui sont venus ici en recherche d’un avenir meilleur ». Constat criant de vérité...
En écho, le secrétaire d’Etat du Vatican, le cardinal Pietro Parolin a affirmé que «la solidarité est l’objectif même de l’existence de l’Europe…L’Europe est née pour ça, pour assurer la paix et une attention particulière aux catégories les plus désavantagées ». Enfin, le président du Parlement européen Martin SCHULZ demande dans le même temps si « nous voulons une Europe qui soit seulement un marché unique ? Ou voulons-nous une Europe qui fasse revivre les valeurs de solidarité, de tolérance, de respect de la personne et d’égalité, qui ont inspiré les pères fondateurs ? ». Comme il le souligne, le Pape invite à plus de solidarité et de responsabilité les uns envers les autres.
En substance, le Pape estime qu'il est évident que la démocratie est menacée tant par l’extrémisme que par le «tout économique». Il a certainement voulu montrer son ouverture et la complémentarité entre la religion et la laïcité. D’ailleurs il veut lui-même ouvrir certains de ses conseils pontificaux à des laïcs.
Ces idées et déclarations ont au moins le mérite de rappeler des vérités qui semblent parfois se perdre dans les discours populistes et démagogiques.
Pour terminer, citons une nouvelle fois le Pape lorsqu'il affirme qu'une «Europe qui  n’a plus la capacité de s’ouvrir à la dimension transcendante de la vie est une Europe qui lentement risque de perdre son âme ».
Sur un plan pratique, il faudra sortir des schémas imposés aux citoyens depuis trop et faire preuve d'imagination. Or, innover n'est pas le point fort des politiques et de leurs partis. Et pour cause... Ce sera donc aux citoyens de s'organiser pour faire entendre leurs voix.

lundi 1 décembre 2014

Une commision européenne new look ?

Le 1er novembre 2014 Jean-Claude JUNCKER a succédé à José Manuel BARROSO à la tête de la Commission européenne. Les eurodéputés ont validé la nouvelle Commission par 423 voix contre 209 et 67 abstentions. Au programme, quatre priorités : l’infrastructure dans l’énergie, les transports, les réseaux numériques et un volet social. Et un plan d’investissement de 315 milliards d’Euros (fonds publics et privés) sur trois ans, dont le Fonds européen pour les instruments stratégiques devra assumer la gestion et surtout les risques.  Mais on sait que la BEI apportera son expertise.
De même la Commission vient d'adopter trois objectifs au secteur énergie-climat jusqu’en 2030 : réduction de 40% des émissions de gaz à effet de serre par rapport à 1990, 27% d’énergies renouvelables et 30% d’économies d’énergie. On ne peut pas dire que ces objectifs soient ambitieux. D’un côté, l’Allemagne, les Pays-Bas, la Suède, le Danemark et le Portugal sont plus ambitieux et privilégient la transition énergétique, de l’autre les plus hostiles : la Grande-Bretagne, la Hongrie, la République Tchèque, la Slovaquie et la Pologne et souhaitent continuer sur les énergies traditionnelles. L'Union européenne est coupée en deux... comme d'habitude.
M. JUNKER a déclaré qu’il ne serait pas « le valet du Conseil ». Il a en effet été choisi parce qu’il était le candidat du parti arrivé en tête aux élections européennes, puis élu par le Parlement. Il a donc  une légitimité inédite jusqu’à présent.
Mais la nouvelle commission prend place au moment où éclate « l’affaire Junker », qui a contribué, alors qu’il était à la tête du Luxembourg (1995-2013), à trouver des arrangements fiscaux avec pas moins de 340 multinationales (dont Ikéa, le Crédit agricole, Axa…) afin que ces dernières échappent au mieux aux impôts. Même si Juncker est à l’origine de l’interdiction du secret bancaire et que cette affaire fait partie d’un passé pas si lointain (les accords ont  étépassés entre 2002 et 2010), c’est bien lui qui a transformé le Luxembourg en place forte financière. Cette affaire en dit long sur les personnes politiques qui nous gouvernent. Bruxelles a pensé qualifier ces avantages d’aides d’Etat, donc interdits. Mais, bien entendu, les pressions exercées à l’égard de Bruxelles compliquent l’action de cette dernière.
D’autres Etats sont d'ailleurs dans le collimateur : l’Irlande, les Pays-Bas, le Royaume-Uni, la Belgique, Chypre et Malte. Et M. JUNCKER a assuré qu’il n’interférerait pas dans l’enquête.
Comme le souligne Pascal SAINT AMANS de l’OCDE, « il n’est pas acceptable que les grandes entreprises puissent profiter des défaillances des règles actuelles pour réduire leur charge fiscale quand d’autres contribuables font face à une pression fiscale accrue sur laquelle, eux, ne peuvent agir ». Et de de souligner « qu’on ne changera les règles fiscales internationales qu’avec un soutien politique fort ». Un effort est indéniablement fait en ce sens.
Il ne s'agit donc pas de critiquer la Commission alors qu'elle est tout juste investie. Soyons d'abord vigilants. Et n'oublions pas que les Etats (et encore ce n'est pas certain mais nous reviendrons sur le sujet) restent bien les maîtres du jeu et que bien des efforts devront être accomplir en matière de démocratie !